Paris, Berlin, Londres
À l’issue de la guerre, les capitales des pays belligérants déplorent de nombreux morts. Comme ailleurs, des monuments sont édifiés pour leur rendre hommage ; mais ces monuments présentent aussi des caractéristiques particulières.
En effet, les capitales accueillent les marques de la mémoire nationale : la tombe du soldat inconnu français sous l’Arc de Triomphe, celle du soldat inconnu britannique à l’abbaye de Westminster – complétée par le cénotaphe de Luytens à Whitehall –, ou encore les bâtiments de la Nouvelle Garde transformée en lieu de mémoire de la guerre à Berlin. Pour autant, si ces lieux de mémoire se situent à Paris, Londres ou Berlin, ils ne sont pas à proprement parler parisien, londonien ou berlinois. Les capitales captent une mémoire nationale dont les marques se déploient prioritairement sur leur territoire, alors qu’elles n’ont pas elles-mêmes érigé de monuments aux morts à leur échelle.
En réalité, l’échelle qui prévaut pour l’édification de monuments aux morts est plus réduite que celle de ces villes entières : c’est celle des arrondissements parisiens, des anciennes communes qui forment le Grand-Berlin et des quartiers londoniens. Les monuments y sont en outre nombreux dans les églises, les écoles et les universités, les administrations et les entreprises. Enfin, le passé spécifique des capitales pendant la guerre structure la mémoire qui s’y développe : Paris commémore les bombardements par des plaques et des monuments distincts, tandis que Berlin, ville de garnison impériale, accueille dans ses casernes et cimetières de nombreux monuments régimentaires.
Elise JULIEN
Maître de conférences en histoire contemporaine
Institut d’Études politiques - Université Lille 2