Le long processus de gestation du monument « À la gloire de l’Armée française 1914-1918 » est plutôt inhabituel. Débuté en 1936, ce qui est déjà une date quelque peu tardive pour un tel hommage, il ne sera effectivement inauguré qu’en 1956, vingt ans plus tard. Le 24 février 1937, le Comité national du monument à la gloire de l’Infanterie française (dorénavant : CNM), créé en 1936, demande l’autorisation au préfet de la Seine d’élever un monument place du Trocadéro, appuyé sur le mur de soutènement du cimetière de Passy.
Le concours de 1937
Dès novembre 1937, un concours est organisé afin de sélectionner un projet définitif sélectionné par délibérations du 27 novembre 1937. Les lauréats du concours sont le sculpteur Louis Henri Bouchard (1875-1960) et l’architecte Albert Drouet (1880-1953). Les huit maquettes sont présentées au Grand-Palais du 28 novembre 1937 au 5 décembre suivant. Le projet de Bouchard est ordonné autour d’une figure monumentale du poilu, juste devant une couronne formant une auréole. De part et d’autre, sur le socle, des soldats en buste donnent l’impression qu’il se trouve dans une tranchée, prêts à défendre le monument. Le parement est décoré de frises monumentales en gradin représentant des soldats. Une composition grandiose, fort ambitieuse, et malheureusement restée sans suite.
Une délibération du Conseil municipal en date du 13 juillet 1939 autorise le CMN à ériger le monument contre le mur de soutènement du cimetière de Passy, mais, la Seconde Guerre Mondiale paralyse le chantier jusqu’en 1950, le Maréchal Pétain informant le président du CMN, dans un courrier en date du 8 octobre 1940, qu’il serait nécessaire d’attendre un moment plus opportun pour décider ou non de l’exécution du monument.
Le projet d'après guerre
Le projet est relancé en 1950, mais il est demandé qu’un monument à la gloire de l’armée française soit substitué au monument à la gloire de la seule infanterie. Le 22 mars 1951, le Conseil municipal de Paris vote une délibération en ce sens.
Durant cette même période, le projet de Bouchard fut abandonné définitivement au profit d’un nouveau programme élaboré par le sculpteur Paul Landowski (1875-1961). Le président Coty pose la première pierre du monument le 11 novembre 1954. Il est inauguré le 13 mai 1956.
Il résulte de ce long processus un projet plus minimaliste, un parement de pierre nu, rythmé par deux inscriptions, à gauche, « A NOS HEROS », à droite, « A NOS MORTS » situées de part et d’autre d’une groupe sculpté d’un peu plus de cinq mètres de hauteur dont le caractère allégorique et académique peut être considéré alors comme suranné, et qui d’ailleurs ne s’éloigne guère de plusieurs projets de Landowski datés des années 1920. Il témoigne en tout cas du beau métier de Landowski, maître habile et expérimenté dans l’exercice de la commémoration.
Frédéric JIMENO
Docteur en histoire de l’art
TEXTE INTÉGRAL : A la Gloire de l'Armée Française